Un conte de fée

(récupération depuis mon petit blog que je n'utilise plus trop)

Un conte de fée (écrit en 2003)

Mamie, 89 ans, ses petits enfants et arrières petits enfants autour d'elle, parlait de sa petite voix éraillée par le temps, regardant d'un air satisfait la troupe de petits et moins petits (voire même carrément grands) assis autour d'elle.
Approchez mes petits...
Venez écouter la belle histoire que je vais vous conter.
Je vais vous raconter un beau conte de Noël... Quoi ? Qu'est-ce qu'il y a encore Epamani... Epimond... Punaise, ta mère elle a toujours été chiante, même dans le prénom de son fils, j'arrive jamais à m'en souvenir... Quoi ? Epaminondas ? Bon d'accord, bon que veux tu mon petit ? Quoi c'est pas Noël !? Oui je sais bien, et si j'ai envie de dire un conte de Noël moi, c'est mon droit !! Sois pas chiant comme ta mère sinon je vous fais ma crise cardiaque hein !!!!!

Bon

Donc c'est l'histoire de Blanche Moufle et les sept cents venains...
Il était une fois une reine dans un pays lointain, une reine qui faisait son boulot de reine quoi... En gros, elle fichait pas grand chose, elle faisait un peu de couture dans son coin avec des gens autour d'elle qui lui disaient "hoooo que c'est beauuu", "hiiiii que c'est joliiiii", même si c'était moche, parce c'était ça le travail de courtisan : dire que c'est beau et bien, même quand c'est moche et nul...
Et cette reine elle attendait un bébé, elle était là avec son gros ventre qui lui tendait bien sa robe, ce qui l'embêtait bien d'ailleurs car on devinait là son gros nombril bien écarté par la grossesse, et puis aussi elle en avait un peu assez d'attendre ce bébé alors qu'elle voulait aller danser, faire du cheval avec ses courtisans, et là elle ne pouvait que rester et attendre, car elle devait donner un héritier au roi et au royaume, et là ça ne rigole plus quand on est une reine et qu'on doit faire un prince pour la succession tout ça (pis aussi pour que le roi il puisse jouer un peu au foot avec son fils, paske, bon, si on est roi on n'en est pas moins homme, et on aime bien se regarder de temps en temps un ptit match à la télé avec la cannette de bière et les chips, et pis aussi taper à l'occase dans le ballon)...
Et le prince naquit... Et c'était une princesse... (argh que la reine elle se dit, tout ce temps comme une grosse vache à rien pouvoir faire pour que dalle !)
Et alors là, faut dire, la reine elle voulait un garçon, alors elle avait pensé à plein de prénoms de garçon, mais une fille alors là olalalala, elle n’y avait même pas pensé dites donc ! Alors la petite, elle est restée là sans prénom. On disait "la petite", "la princesse", pis aussi des fois "toi là"...
Et puis un jour que la reine elle était allée avec ses courtisans faire du ski alpin là haut dans la montagne, voilà-t-il pas qu'elle perd sa moufle blanche, et que sa fille, qui avait quand même déjà facile 4 ou 5 ans elle la lui rend, et la reine la voit avec en sa petite main enfantine la moufle immaculée telle la neige vierge sous le doux soleil du matin hivernal, et elle se dit (la reine) "ho mais je vais l'appeler Blanche-Moufle la petite princesse".... (elle a vachement d'imagination la reine)(ceci dit elle n’est pas payée pour avoir de l'imagination)(en fait elle est pas payée du tout)(juste nourrie, logée, blanchie)
Quoi api... Opema.... Epami... et merdeuuuuuu, Quoi kestuveuuuuuux ?? Quoi c'est long mon histoire ? Mais tu peux pas écouter tranquille toi ?
Bon je continue, allez j'suis brave je vais essayer de vous la faire plus short...
Alors la petite princesse, un jour elle est devenue grande, et elle est partie jouer dans la forêt, et elle arrive devant un château où y'avait un gros matou avec des bottes un peu pourries crottées, qui lui propose de vérifier si elle est une vraie princesse et tout et tout...
Alors il lui dit comme ça "ho petite princesse sans nom, si t'es une vraie princesse ben tu vas aller roupiller un coup là sur les 12 matelas que tu vois là bas.
Alors là Blanche-Moufle elle regarde le lit avec les 12 matelas, "'taing" elle se dit (elle a un petit accent du sud fort charmant oui), "oulaaaa mais c'est quoi ça, faut une échelle, carrément, pour aller se coucher, et y'a presque plus de place pour entrer sous le ciel de lit" (ben oui, c'est un conte de fée, alors ils ont des lits à baldaquin !) "j'm'appelle pas la crêpe, moi, non mais !!!"
Bon mais quand même c'est une brave fille, et pis le chat, là, il fait un peu pitié, elle ose pas trop refuser, alors elle remonte sa robe longue et un peu/beaucoup encombrante, pis elle grimpe l'échelle, elle arrive en haut des 12 matelas, elle se glisse dans le peu de place qui reste entre le matelas du dessus et le ciel de lit, pis elle fait en sorte de pouvoir encore respirer, et elle s'endort.
Au bout de pas longtemps, elle se réveille, y'a quelque chose qui la gène...
Un bruit, mais alors là c'est pas rigolo comme bruit, elle s'extirpe du lit, elle redescend l'échelle, et elle suit le bruit là, ça ronronne un peu/pas mal, c'est bizarre... Elle sort de sa chambrette, elle suit le bruit, et là paff elle arrive dans un super grand couloir avec plein de portes, elle ouvre la porte à côté de sa chambre, et qu'est-ce qu'elle voit ??? hein hein ? qu'est-ce qu'elle voit ? vous le savez vous les loupiots ?
Bon j'abrège, elle voit un lit super haut comme le sien, avec une grosse bosse qui ronronne sous le ciel de lit ! "'taing" elle se dit, y'a une princesse qui roupille là aussi !! Alors elle sort de cette chambre, elle ouvre une autre porte, et encore un lit avec une princesse encastrée qui ronflote... Encore une chambre, encore une princesse... En tout 53 chambrées à princesses roupillantes !
"Mais c'est quoi ça ? Mais je reste pas dans un château bourré de princesses qui roupillent moi, en plus tout ça pour un chat tout miteux avec des bottes mêmes pas jolies et sales, non mais !", et là, elle cherche la sortie, c'est facile c'est marqué EXIT, et elle quitte le château aux belles aux boas dormants (quoique belles finalement on n'en sait rien, on ne les a même pas vus)...
Bon du coup elle se retrouve dans la forêt, et elle se perd, pas maligne la Blanche-Moufle, même pas foutue de retrouver son chemin ! Enfin c'est ça une princesse, c'est pas toujours bien équipée pour la vie... Et alors la princesse elle voit quand même que c'est la nuit et que ce serait bien se trouver un p’tit abri pour dormir un peu en attendant le jour, alors elle se promène un peu le nez au vent, les yeux à l'affût... Et elle arrive à un gros arbre énorme, genre séquoia mâtiné chêne tout noueux et avec un super gros trou dans le tronc, et même que ce trou il était bouché par une porte en bois...
"Ho tiens" se dit Blanche-Moufle "on dirait un séquoia mâtiné chêne tout noueux avec un super gros trou dans le tronc bouché par une porte en bois", et elle s'approche et elle voit que c'est bien une porte en bois, elle pousse un peu et la porte, elle s'ouvre !!!
Alors là, elle hésite un peu, j'entre, j'entre pas, keskya là dedans, et si y'avait un monstre qui me bouffe, et si y'avait mon papa et ma maman, et si y'avait un coin pour dormir tout bêtement... Et elle prend son courage à deux mains (sploch sploch)(bruit des mains empoignant le courage), et elle entre... Et elle voit.....
En fait elle ne voit rien du tout car il fait très noir là dedans...
Alors elle entre en tâtonnant, et en chantonnant (pour se donner du courage) et de tâtonner en ânonnant, et sent sous ses fins doigts délicats de princesse qui n'a jamais rien fait de ses mains de sa vie, elle sent un interrupteur (ouhaaa z'ont l'électricité dans la forêt ! trop bon !!)(bref), elle presse l'interrupteur, et ça s'allume, et là elle voit une petite maison quand même pas mal grande là dedans... Pis d'autres petites portes (y'a plusieurs pièces donc), et là elle est dans le salon, y'a des canapés, une grande table, une télévision, un bar... Tout ça un peu à l'échelle d'un enfant. Elle ouvre une porte, et elle arrive dans une chambre, genre super méga grande, avec des lits superposés comme à la colo, mais des lits à sa taille à elle, pas à la taille à son papa et sa maman (le roi et la reine je rappelle pour ceux qui ne suivent pas), elle ouvre une autre porte et elle arrive dans une bibliothèque avec plein de petits fauteuils partout, et des étagères avec des livres plein plein (là elle ferme vite la porte, paske Blanche-Moufle ben elle ne s'intéresse pas du tout aux livres), elle ouvre une autre porte, et elle voit une salle de bain, avec des petites baignoires dorées partout, des lavabos, des petits bidets, des miroirs en veux-tu en voilà tellement qu'il y avait au moins 200 Blanche-Moufle avec tous ces reflets...
Bon pis elle est fatiguée, elle en a un peu marre d'ouvrir des portes partout comme ça, d'autant plus que finalement c'est vachement grand à l'intérieur d'un séquoia mâtiné chêne... Alors elle retourne vers la porte de la grande chambre avec tous les lits, et elle se couche tout bonnement, et elle s'endort.
Et dans la nuit sombre et noire telle le goudron frais qui vient d'être déposé sur le ruban ourlé d'incertitudes de la route en construction, donc dans la nuit, un petit chant se fait entendre et enfle doucement jusqu'à se faire entendre distinctement "hey ho, hey ho, on revient du boulot" et c'est beauuu comme chant, on dirait un coeur de l'armée russe, et ça chante en canon, et ça fait des trémolo parfois... Blanche-Mouffe n’entend rien : elle dort.
Et là, la porte de la maison arbre s'ouvre, et entrent dans une joyeuse cacophonie toute une flopée de petits bonshommes (des venains)(vous l'aurez compris, d'après le titre du conte héhéhé), et même si on les compte bien y'en a 700 en tout, mais ils ne peuvent pas tous entrer dans l'arbre, ça a beau être un arbre super géant faut pas exagérer quand même, alors ils ont fait un tour de rôle, et y'en a 100 qui entrent et 600 qui s'installent dans des p’tites tentes dehors, et le lendemain ils changent de tour... Et pour se laver le matin c'est à tour de rôle, c'est pour ça qu'ils travaillent la nuit : le temps que tout le monde soit propre c'est déjà presque le soir !
Donc les 700 venains entrent, enfin une partie entre, et on peut les voir c'est comme les nains dans Fort-Boyard, y'a Passe-Partout, Passe-Temps, Passe-Poil, Passe-Lacet, Passe-Ton-Chemin-Manant, Pas-Ce-Soir-J'ai-La-Migraine, Passe-Rot, Passe-Agé (c'est lui le chef d'ailleurs)... Et là quand même avec le bruit de tous ces venains la petite Blanche-Moufle elle se réveille, et elle se rend compte tout à coup qu'elle a fait une grosse boulette d'être entrée comme ça chez quelqu'un qu'elle ne connaît pas, pis de s'être installée dans un lit, c'est quand même sans-gêne, et elle se fait toute petite autant qu'elle le peut, et elle se cache doucement derrière un lit pour pas qu'on la voit. Mais c'est peine perdue car un venain ça a non seulement une bonne vue (alors elle peut se planquer la p’tite princesse, elle y coupera pas !), mais ça a aussi un bon odorat et une bonne ouie...
Alors y'en a un tout à coup (je crois que c'est Passe-Hoir) qui dit "Ho ho hooooo, mais je sens comme un parfum délicat, comme une petite odeur pas habituelle, ça sent un peu la gazelle, un peu la fleur des champs, un peu la bise légère printanière, un peu la montagne sous le soleil" (oui, c'était un poète ce venain là !).
Et de suite tous les venains avec leur nez tout plissé, snif snif snif, à renifler presque tous les coins, je dis presque car là ils ne l'ont pas encore trouvé la petite princesse cachée.
Ensuite y'a Pas-De-Deux qui réfléchit et dit doucement "Hé hé héééé, j'entends comme un petit bruit, comme une petit souris malicieuse, comme une brise douce entre les feuilles d'un arbre, comme le pied d'une donzelle dans l'herbe verte des prés..." (il s'essaye un peu à la poésie car il est passablement jaloux de son copain qui sent bien (Passe-Hoir donc)).
Et là, tous les venains, avec leurs oreilles frétillantes qui écoutent, qui écoutent, ils essayent de faire le moins de bruit possible pour mieux écouter...
Et quand même, ils trouvent que sentir quelque chose de nouveau, entendre quelque chose d'étrange ça fait déjà beaucoup de nouvelles choses !
Et enfin, y'a Passe-Muraille qui ouvre la porte de la chambrée, et qui regarde partout partout avec ses yeux genre super Jamie, et il voit la petite princesse cachée là derrière une grosse couette, et il dit "Hi hi hiiiiiiiii, je vois un petit être mes amis venains, un petit moussaillon pas comme nous, une petite chose terrée là derrière le lit" (lui n’est vraiment pas doué pour la poésie !).
Alors Blanche-Moufle, elle sort de son coin, en tordant ses petites mains comme une enfant qui a fait une bêtise et qui attend sa punition, et elle s'avance timidement, et elle dit "bonjour, je suis Blanche-Moufle, vous savez la princesse, et je me suis perdue dans la forêt, y'avait un chat avec des bottes toutes sales il voulait me faire dormir sur un empilement de matelas qu'on étouffe quand c'est comme ça et en plus y'avait plein de princesses qui ronflent, et alors je suis arrivée là, et je me suis endormie dans un lit doré... Heuuuu c'est chouette chez vous, je peux rester un peu en vacances ?".

Mamie regarde les petits de ses petits, pis aussi les petits des petits de ses petits (ça fait petits petits petits, un peu basse cours ça, mais aussi ils sont si pleins de vie, si bougeants), alors tous ces petits, tous ses petits, ben ils dorment tous....
Rhalalalala la jeunesse n'est plus ce qu'elle étai,t tiens, de mon temps, on écoutait les belles histoires !!
Tiens allez j'vais me boire un p’tit porto pis me coucher vas....